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2 juin 2013

Kilbi 2013: samedi


Illustration: Guillaume Dénervaud
Le dernier soir fut sans aucun doute la meilleure soirée de cette édition du Kilbi. Normal avec Andy Stott, Death Grips ou encore les Flaming Lips. Une programmation tellement riche qu’on a même dû se résoudre à rater certains concerts. Une fois encore, coup de main tierce pour ne rien oublier, ou presque.

Pierre: La fatigue et le froid commencent à gagner du terrain. Certains compensent en faisant du shopping, d’autres en multipliant les repas, d’autres encore en squattant le club toute la soirée. De mon côté, c’est mon tour de conduire. Sous vos yeux, la première review faussée par aucune forme d’euphorisant, ou peut-être justement faussée de ce fait.

Julien: Pour la première fois en 2013, le Kilbi connaît le soleil. Il semble que l'affluence ait doublé. On parvient enfin à s'asseoir par terre et à humer le doux air de Düdingen. La soirée s'annonce royale, et l'on ne sera pas déçu par nos multiples choix, aussi douloureux qu'ils furent - je rate Andy Stott pour photographier et halluciner devant les Flaming Lips, je manque Jandek pour faire de même avec Skip&Die, etc. Mais crème du jour, il y eut, ça sera d'ailleurs ma seule intervention de cette review du samedi.


La crème du jour 
Pierre: C’était la grosse attente de ce Kilbi 2013 : Andy Stott devait montrer ce que des exercices aussi réussis que LUXURY PROBLEMS ou PASSED ME BY pouvaient donner en live. Tout a été fait pour faire monter le suspense et les craintes. Des problèmes techniques. Un début de concert très expérimental. Puis les basses, sans jamais (du tout) s’affaiblir, se sont mises en mouvement. La suite fut de la pure folie et pour moi le meilleur concert de cette édition : une techno-dub époustouflante, dansante. Andy Stott manipule en direct les différents genres (disco, drum’n’bass, dubstep, reggae) pour ne se concentrer que sur les basses, jouissives de puissance et de rythme. Le live s’appuie sur différents titres des albums, ne boudant pas le plaisir de jouer "Numb" en live, tout en utilisant d’autres matériaux permettant un live plus dansant. Une fois de plus, la petite salle du Bad Bonn aura donc été le lieu des meilleurs moments du festival.

Julien: The Flaming Lips donc. Incroyablement critiqué aussi par une bonne moitié des spectateurs présents… le temps de haïr la prestation monstre du groupe d'Oklahoma City. Il faut dire que la configuration peut fâcher: confettis, piédestal sur lequel se tient un Wayne Coyne tendance cuire argentée, poupée à la main, tuyaux de LED à ses pieds, formation jouant presque exclusivement assise sur scène, énorme affichage éclatant. Et pourtant, les Lips n'ont pas sorti le grand arsenal scénique. Musicalement, c'est toujours la grande classe, même si l'ouverture avec "Look...The Sun Is Rising" et "The Terror" issue du tout récent THE TERROR (voir la vidéo ci-dessous, la disposition était à l'identique) n'est pas des plus accessibles. Plus rentre-dedans, The W.A.N.D. est la carte d'entrée au concert; s'ensuit l'interlude "Virgo Self-Esteem Broadcast" introduisant le flamboyant "Silver Trembling Hands" et son refrain à tomber par terre (provenant du tortueux LP EMBRYONIC). Parfois stupéfiante mais jamais pompante, la suite du concert jongle entre space pop, tubes repris ("Heroes") ou désincarnés ("Do You Realize??", tout nu), beaucoup de morceaux étant issus des productions "contemporaines" du groupe (notamment de YOSHIMI BATTLES THE PINK ROBOTS). Terminus avec le nouveau titre "Always There, In Our Hearts" annonçant des Flaming Lips qui ne craignent ni les années ni le bruit.


La déception du jour 
Pierre: Une programmation presque sans faille pour ce dernier soir de Kilbi. La seule déception aura été de rater de nombreux concerts : le batteur foufou Sartorius et surtout les Flaming Lips. Heureusement, comme on forme une équipe, Julien a pu assuré le renfort.

Le craquage de slip du jour 
Pierre: Le dernier concert de la soirée se déroule toujours sur la grande scène, chaque soir un peu plus tard. Faisant face à un public qui a eu le temps de se mettre bien, ce concert prend souvent des allures de défoulement. Avec Skip&Die, il est clair que cette règle s’est vue confirmée. Congas, tenues rigolotes et chanteuse moitié M.I.A. moitié Madonna en mini-jupe. S’il l’on était amené à juger un pays en fonction des groupes qui en viennent, l’Afrique du Sud a l’air d’être un sacré bordel. Un mélange improbable de différents styles, cumbia, rap, dubstep, électro-pop pour des titres qui se veulent à chaque fois des tubes imparables. La finesse une fois de plus n’est pas au menu, mais pourquoi rougir de son plaisir à saliver devant des plats efficaces et agréables.


Le tour du monde 
Pierre: Les premiers concerts du samedi furent les derniers moments destinés au rock historique, si cher à la campagne fribourgeoise, avec des groupes bien droits dans leurs influences :White Fence ont beau être américains, ils jouent encore à la façon Beatles, c’est certainement du pop/rock bien fait, cela n’en est pas moins ennuyeux et daté. Les Alla Lahs, eux, ne trompent pas sur leur origine, ils viennent de Californie, ils font donc de la surf pop. Cette fois, c’est léger et plutôt bien fait, une forme de rock garage apaisé et chanté sur la plage. Après on passe aux choses sérieuses. C’est 21 heure et Death Grips jouent déjà. Sûrement programmés un peu tôt, peu importe, tout n’est plus que nuit, ombres bleues et violence suante. Privé de la batterie, la force de frappe est concentrée sur les samples et un rap bien bien punk. Une bite et une couille, cela fait encore une bonne bifle. Le chanteur ondule et frappe avec sa voix. Les grands titres comme "Get Got", "I’ve Seen Footage",  "Fever" et surtout "Hacker" conviennent parfaitement au live. Néanmoins, la violence inouïe de Death Grips ne s’adapte qu’imparfaitement à une grande scène en extérieur. Malgré la puissance de la musique, on reste donc sur notre faim tant on attendait un déchainement de ce concert. Pour Trust, on retrouve un son qui se veut froid et sanglant, une version plus cold-wave de leurs compatriotes de Crystal Castles. La froideur des samples eighties se ressent bien mais ne parvient pas à captiver. Tant pis on fonce prendre notre place au premier rang pour Andy Stott. A peine sorti du concert de ce dernier, difficile d’enchainer avec le set de Gold Panda : à peine a-t-on le temps de remarquer que le passage au live signifie aussi pour lui plus de grosses basses, moins de mélodies. Dommage. Comme chaque année, le Kilbi se finit en se dandinant sur les 45 tours rétro de DJ Fett, un peu de reggae, un peu de soul, et c’est tout ému qu’on se dit à l’année prochaine.