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31 janv. 2011

TT TV: BIG JON (CH)



Première vidéo pour la TT TV, en l'occurrence un mini-documentaire signé par un proche de Think Tank, même s'il préfère appeler ça "reportage infiltré". Big Jon vaut le détour, par bien des aspects.

Etudiant en photographie à Lausanne et avec une grande attache au cinéma (il a notamment sévit aux nouvelles occupations des usines Leclanché à Yverdon ou encore en tant que membre jury des jeunes et responsable de la vidéothèque du Festival du film de Locarno), Douglas Mandry a réalisé Big Jon récemment, dans sa ville natale d'Yverdon-les-Bains. Un mini-docu sobre et pudique, qui inaugure brillamment notre média hétéroclyte TT TV. On lui a tendu le micro: "Big Jon a toujours voulu servir et protéger, défiler sous les drapeaux nationaux. N'ayant jamais pu suivre de formation, il s'entoure de médailles et d'uniformes, se constituant ainsi un rôle, une identité. Mon travail s'articule autour de la vitrine qu'il se crée, qu'il présente, qui le définit, et qui fait de lui un personnage aussi fascinant que touchant".


Plus: viméo de Douglas Mandry

30 janv. 2011

TANKINO: LA PETITE CHAMBRE (CH)

Photo: Julien Gremaud

Pour récupérer de la Think Tank Party de la veille au Romandie, on est s'est acheté un ticket pour La Petite Chambre au confortable Rex 2 de Vevey. Premier long métrage du duo féminin Stéphanie Chuat et Véronique Reymond, ce film remplit les salles depuis sa sortie. Ce n'est pas un hasard: la thématique est sobrement traitée et la réalisation irréprochable. Ou presque.

De la difficulté de trouver un titre à son film d'abord: ici, pas de véritable problème d'interprétation ni de traduction. En revanche, celui-ci oriente le sens de la lecture. Où il est question de vieillesse, surtout, et de la mort, un peu. La Petite Chambre entend aussi accoler plusieurs générations, entre drames ordinaires et extraordinaires. L'idée du film consiste à croiser deux personnes autant perdues l'une que l'autre, sans attache, en plein intersection dans leur vie et n'entend absolument pas à dramatiser ou moraliser qui que ce soit. Le titre donc: cette chambre d'un enfant mort dans le ventre de sa maman, Rose, joué par Florence Loiret-Caille (Seule d'Erick Zoncka, mais aussi SoeurThérèse.com – faut bien vivre), solitaire, en attente, même si on sait qu'au fond tout finira par s'arranger - et c'est le cas. On voyait plutôt le titre comme métaphore de cette pièce – d'EMS – attendant fatalement l'octogénaire Edmond (Michel Bouquet qu'on ne présente plus). Sa petite chambre à lui, il la visitera l'espace d'une semaine, le temps de se remettre d'une chute d'arrosage de plante. Il y a donc ces deux destins croisés mais unis durant les 87 minutes du film, des attitudes, de la pudeur et quelques supers moments, d'une grande classe ou au comique de situation sobre. Michel Bouquet est proprement renversant. Il nous fout les jetons, arrive à ne pas surjouer ce rôle pas si facile que ça. En revanche, Florence Loiret-Caille est parfois casse-couille quand il faut être pathétique en tant que mère touchée par le drame, mais solide dans ces moments d'entre-deux, entre début de névrose et lucidité en tant qu'infirmière de jour. Evitons de parler du troisième rôle, celui tenu par Eric Caravaca  (La Parenthèse Enchantée de Michel Spinosa notamment) en petit graphiste un peu plus que simple loser.



L'autre force de la Petite Chambre tient dans le plaisir ressenti d'enfin voir de belles images de sa région. Des lieux connus, Lutry, l'établissement A La Bossette, une enseigne Denner, l'Université de Lausanne et enfin, grand Dieu, les Diablerets, filmés au 35mm sans artifice et sans longueur, placidement et simplement. De quoi encourager sans doute d'autres productions locales. Brillant, le film s'écroule paradoxalement lors de son dénouement, alors qu'on atteint les hauteurs, sur le Glacier. En cause, un scénario tiré par les cheveux et des interactions dispensables: Stéphanie Chuat et Véronique Reymond se servent de photographies et du rapport de leurs personnages à ces dernières pour faire avancer le film et asseoir son décors. Quand Edmond, déjà en fugue de son EMS de décide de quitter sa cachette - l'appartement de son infirmière de jour - ni une ni deux Rose et son mari prennent la Monospace direction le col du Pillon et le départ des télécabines. C'est que Marc, le mari, avait reconnu les Diablerets sur la photo où posait feu la femme d'Edmond.  Ben voyons. Rose avouait ne rien y connaître. Et donc, nous on n'y comprend plus grand chose quand on voit entrer La Petite Chambre dans une petite course poursuite (on est en Suisse hein, on ne fait pas dans le spectaculaire), bousillant totalement la splendeur des images d'Edmond empruntant les derniers escaliers menant à son départ de cette terre. "Je ne veux pas m'éteindre à petit feu" avait-il témoigné. Qui a donc pu obliger les réalisatrices de massacrer cette fin de film qui se serait suffit à elle-même en nous assurant que vraiment, c'était logique que ce vieux monsieur s'en aille mourir sur sa montagne? La Petite Chambre aurait pu être nominé aux Oscars pour représenter la Suisse – la TSR s'était superbement emmêlée les pinceaux en annonçant faussement la bonne nouvelle - si la fin eu été soignée. Bon sang, on tenait pourtant là un film qui aurait pu devenir classique dans notre paysage cinématographique… Rappelons tout de même qu'il s'agit du premier long métrage de ce duo lausannois. Si elles confirment en gommant ces 2-3 défauts à l'avenir, ça sera le pied.


28 janv. 2011

TANKART: High Places vs. Mankind

Illustration: booklet
High Places détient sans doute la palme de la meilleure photo de pochette d'album en 2010. Bien qu'intéressant sur plusieurs points, le disque, HIGH PLACES VS. MANKIND se perd malheureusement dans un décorum éthéré, malgré d'excellents morceaux comme "The Longest Shadows". L'achat de leur LP permet de télécharger – outre les MP3 – le booklet. Bien fait. On vous le fait connaître.







































27 janv. 2011

LP: Honey for Petzi, General Thoughts and Tastes

Illustration: pochette de l'album
Que peut-on encore faire quand on a déjà plus de dix ans de carrière derrière soi? Qu’on fait partie depuis un bout de temps des groupes reconnus de la scène locale ? A cette question, Honey For Petzi assènent une réponse cinglante : on peut encore écrire de grands albums.

Disons le tout de suite, GENERAL THOUGHTS AND TASTES est très très réussi. C’est comme si toutes les années à tourner, à composer mais aussi à écouter ce qui se fait de mieux, accouchaient de ce disque riche et pétillant. Dès la pochette et le titre, on sent qu’on est en face d’un classique. Six ans après leur dernier opus, les lausannois abandonnent certains de leurs réflexes post punk et noisy pour oser écrire des chansons rapicolantes, inventives et détonantes. Le disque fait penser au dernier No Age, EVERYTHING IN BETWEEN, pour son côté accompli et varié. En plus, le registre d’Honey For Petzi est moins puriste. J’ai tendance à trouver que treize chansons, c’est un peu trop. Mais avec GENERAL THOUGHTS AND TASTES, on ne se sait pas où donner de la tête. Tout ça commence sur le riff post punk des plus classiques de Endless Sea. Ce début d’album est un trompe-l’œil car vite apparaît la grande nouveauté de ce nouvel album, les gars d’Honey For Petzi se sont mis à chanter sur presque toutes leurs chansons, ne gardant qu’une seule instrumentale, Curtains. Cette entrée fracassante du groupe dans un format chanson plus classique est au combien positive. Délaisser la pureté post punk instrumentale pour se plonger dans une pop fraiche et inventive, voilà qui fait plaisir. Que les postpunkers fervents se rassurent, ils ne seront pas en reste avec des titres comme Fitness Wellness ou la susmentionnée. Surtout, l’influence reste forte pour l’ensemble de l’album. Mais ici on pense plutôt aux formations les plus inventives du genre comme Pylon ou les Talking Heads. L’impact de Yo La Tengo se fait également sentir sur beaucoup de chansons. Made of Concrete, déjà présenté sur TT, est une merveille, un diamant noir au refrain en forme de danse de dandys au clair de lune. Cette classe nonchalante se retrouve sur d’autres titres tout aussi réussis : Black Comedy, Handmade Cloaks ou encore la magnifique Old Night Tale. Comme tout album accompli, GENERAL THOUGHTS AND TASTES se finit par un titre plus lent et acoustique, Faces, histoire de dire mélancoliquement au revoir. Bref, avec ce disque, Honey For Petzi passent nettement à la catégorie supérieure laissant derrière eux les instrumentales et les titres en français pour jouer dorénavant dans la cours de l’excellence pop aux côtés des MGMT, Belle And Sebastian et autres Yo La Tengo.


GENERAL THOUGHTS AND TASTES est donc le septième album d’Honey For Petzi. Même si c’est bateau, on ne peut que le qualifier d’album de la maturité. Cette caractérisation fait parfois peur aux groupes qui voient en elle un effet de l’assèchement de la jeunesse, de cette force insouciante qui marque les premiers concerts et les premiers albums. Mais la question est de savoir de quoi est faite cette maturité. Si elle signifie la routine, l’enferment dans des tics stylistiques ampoulés et datés, alors oui la maturité n’est rien d’autre que le signe d’un groupe qui refuse de mourir malgré son état de dégénérescence avancé. Mais la maturité peut d’un autre côté signifier une maitrise mise au défi d’une créativité toujours renouvelée et de l’évolution musicale actuelle. Avec GENERAL THOUGHTS AND TASTES, y a pas photo, Honey For Petzi boxent dans la seconde catégorie. Leur créativité n’a peut-être jamais été aussi aiguisée et leur son aussi frais. C’est pourquoi on se réjouit à fond de les revoir au Romandie le 28 janvier. En plus après y a l’after Think Tank. Bref malheur aux absents, ça va être du bon son et de la folie toute la nuit !

21 janv. 2011

MUSIK TANK: THE SHIRELLES

Illustration : Saïnath


Ma main à couper que chez Think Tank nous sommes les seuls à avoir pensé à fêter les 50 ans d’anniversaire d’une des plus belles chansons d’un girls band novateur ; Will You Love Me Tomorrow est le premier single d’un groupe composé uniquement de filles à atteindre le sommet des charts aux Etats-Unis en janvier 1961 – et c’est signé The Shirelles !

Très souvent lorsqu’on évoque les groupe-à-filles des années 60, on a tendance à placer les Ronettes, les Crystals ou les Shangri-La’s au-dessus du lot. Une des raisons à cela, c’est que derrière ces différentes formations, se trouvait aux manettes de la prod Phil Spector. Sauf les Shangri-La’s, avec lesquelles Spector ne collabore pas. Pas grave, elles avaient quelque chose en plus. Certains diront que c’étaient leurs textes, d’autres la mélodie parfaite et quelques spécialistes les hisseront au panthéon du genre pour leur côté anti-love, précurseurs de groupes plus sombres, tels Jesus & Mary Chain, The Velvet Underground ou aujourd’hui les Warlocks, BJM voire Beach House. Mais peu avant les grands hits des Ronettes & cie, se formait en 1957 au lycée de Passaic dans le New Jersey un groupe 100% féminin, 100% black, 100% novateur et 100% génial : The Shirelles.


Les quatre lycéennes qui forment alors The Poquellos (leur nom juste avant de se faire signer) écrivent leur première chanson I Met Him On Sunday l’année de leur formation et interprètent cette composition originale à capella dans leur école. C’est la mère d’une de leurs amies du lycée, Florence Greenberg, qui décide de les prendre sous son aile, de les signer sur un label conçu spécialement pour elles et de les rebaptiser The Shirelles en hommage à Shirley, la lead singer et co-writer du groupe. Elles enregistrent aussitôt leur titre (avec instrumentation cette fois) publié chez Decca Records qui se classe dans le Top 50 US. Quelques flops plus tard, le groupe signe un contrat sérieux chez Scepter Records et sera alors aidé par l’excellent producteur Luther Dixon – qui à l’époque a déjà travaillé avec Elvis et qui, plus tard, écrira la chanson Boys (reprise par les Beatles) et travaillera avec les Jackson 5 et les Platters. Dixon participe alors activement au processus de composition des futures chansons du groupe. Après quelques reprises, dont Dedicated To The One I Love en 1959 (piquée aux 5 Royales), le duo L. Dixon/Shirley Owens écrit Tonight’s The Night, qui n’est pas un grand succès, mais qui présente alors déjà les immenses qualités du groupe : une écriture fraîche, simple et directe. Le crescendo qui ouvre la chanson sur son refrain présente ensuite un titre doté d’une partie rythmique très soul emmenée grâce à un mariage parfait entre la guitare et la batterie, jouant à contre-courant et laissant tout l’espace lyrique à la voix grâcieuse de Shirley, appuyée et sublimée sur fond de chœurs bouillants. Pouvait-on faire mieux alors ?


En 1961 sort donc Will You Love Me Tomorrow, tiré de l’album Tonight’s The Night. Le single se classe numéro un aux Etats-Unis (et numéro deux en Angleterre) ce qui est alors une première pour un groupe composé uniquement de filles. Ici, l’amour et le doute cohabitent, hésitant sans cesse entre crainte et espoir : « Is this a lasting treasure or just a moment’s pleasure ? ». Chaque note retombe à chaque fois sur l’inévitable question du titre de la chanson, toujours relancée par l’écho des violons qui chasse les craintes un peu plus loin, permettant d’y croire un peu plus. Ce succès relance les titres moins connus du groupe, Dedicated…, Boys ou l’excellent Mama Said. Une année après, le groupe enregistre son deuxième (et meilleur) album : Baby It’s You, dans lequel se trouve les plus grandes chansons du groupe : Soldier Boy, The Things I Want To Hear (Pretty Words), The Same Old Story, Make The Night A Little Longer et le self-nommé Baby It’s You. Entre ces petites perles, divaguent quelques chansons-pour-danser qui ne déplaisent pas, mais qui manquent parfois de matière (Big John reste assez bonne tout de même). C’est sur les morceaux de la première catégorie – réelles pépites du genre – qu’il faut comprendre le disque. Le refrain en colimaçon de Make The Night A Little Longer fait tourner la tête et plonge l’adolescent dans un été qu’on aimerait « just a little bit longer ». Le charme discret et faussement naïf de The Things I Want To Hear vaut les plus beaux titres des Chiffons et que dire du Nancy Sinatrien The Same Old Story où il est impossible d’oublier la ligne : « I know ev’ry little things about you » (prononcé « ya ! ») qui résonne encore longtemps dans la tête à la fin du morceau. Puis, évidemment, il y a Soldier Boy qui devient le deuxième et dernier numéro un du groupe aux Etats-Unis avec son riff à la Shadows. En ouverture du disque, on retrouve la chanson titre éponyme pour ne pas rater le décollage. Mais comment le rater ? Baby It’s You est le prototype de la chanson soul parfaite avec ses chœurs, sa batterie sourde et ses paroles intemporelles et destinées à tous, car sans aucune allusion directe à un sexe déterminé. C’est ce qui explique pourquoi elle connut un immense succès et fut tant reprise autant par les Beatles en 1963, puis par bien d’autres : Elvis Costello, Johnny Thunders et puis The Smith plus tard. Les paroles ne demandent aucune modification que ce soit pour la chanter à sa copine, à son copain, à sa muse, à son père, à sa sœur ou à son ex petit ami… Et tout de suite, ça sonne et on ne peut se tromper : un classique est né. L’album Baby It’s You n’est pas une quête, mais une demande de tendresse et d’amour, priée et dansée par quatre grandes chanteuses aux voix émouvantes et illuminées, pleines de vie. Dixon quittera le groupe en 1962, laissant le groupe orphelin de celui qui les hissa si haut.  « Je ne peux m’aider moi-même » chantait Shirley une année avant… Pour la peine – et c’est cadeau – voici une version unique et nouvelle de Baby It’s You, interprétée spécialement pour Death Proof en 2006 (hé oui encore lui…). Une scène inédite et intégrale, et à capella s’il vous plaît ! Tiens… N’était-ce pas ainsi que les Shirelles commencèrent ?


20 janv. 2011

TT TRIP: Tennis

Photo: Julien Gremaud
C’est un jeune couple de navigateurs qui se cache derrière ce nom sportif, une promesse de romantisme et d’embruns lyriques. Pour le vérifier, écoute de leur premier album et déplacement à leur concert à Berne.

La mythologie qui entoure Tennis veut qu’il s’agisse d’un couple qui, lors d’un voyage de noces, s’est mis à écrire des chansons. Comme dans tout mythe, ce qui importe, ce n’est évidemment pas sa vérité factuelle mais sa signification. Et il est clair que ce motif correspond tout à fait à l’ambiance générale de CAPE DORY. Les chansons ne sont que comptines d’amour et candeur partagée. Ca suinte de tous les côtés. Ames insensibles s’abstenir. Ici pas de passion violente, mais une antique romance hors du monde, baignée d’innocence et d’insouciance. Tout ça, c’est très beau. L’instrumentation ouateuse et la grâce de la voix féminine rappellent évidemment la dream pop de Beach House. Mais si ces derniers produisent une musique dont le côté grandiose touche au splendide, Tennis joue dans un registre lo-fi moins proche des cimes. Plus que celle d’un chef d’œuvre, la beauté de CAPE DORY est celle de l’intime. C’est tout le talent de Tennis que de réussir à transformer un sentiment et une expérience personnels en une émotion universelle. On se sent profondément touché par ces chansons qui expriment le bonheur et la tendresse. Et de rêver à celui/celle qu’on aime. Et de pleurer celui/celle qui nous manque. Les tourtereaux auraient également été marins avant de se lancer dans la musique. Et ce thème des bateaux traverse également tout l’album : « Sitting in the sand waiting for you to return to land». Presque tous les titres font référence aux mondes nautiques. Le décor est planté : la vie d’amour au bord de l’océan. Le bonheur, c’est regarder passer les Waterbirds, la peur c’est naviguer la nuit. Tout ça fait un peu cliché, mais c’est tout le contraire car Tennis jouent une pop tout sauf kitch, qui fait penser aux années 50 ou au motown ou aux tropiques. On ne sait plus très bien. Ce gout pour le vintage se retrouvent dans certains de leurs jolis clips composés à partir d’images de cinéma muet. En moins d’une demi heure, CAPE DORY renferme plusieurs bijoux : Marathon fait mine d’accélérer en toute délicatesse, South Carolina fait pleuvoir les « wouhou wouhou » et Pigeon donne des frissons. Tennis réussissent avec une guitare, une batterie et un synthé à créer une pop merveilleuse tout en étant très simple, à l’ambiance proprement envoutante.


Le 13 janvier, c’est dans le petit et agréable ISC Club de Berne que Tennis ont largué les amarres. Après le cauchemar ultime que représente un concert de trentenaires suisses allemands jouant du rockabilly, c’est avec un espoir de délivrance que j’attends Tennis. Sur scène, les impressions de l’album se confirment. Le couple accompagné de son teneur de chandelle de batteur est tout en innocence, sourire et candeur. La chevelure et surtout la voix de la chanteuse impressionnent. Quand elle se met à faire des sauts de cabri, ça n’a rien d’un déferlement sauvage. Au contraire, on reste dans le registre de l’innocence et quand ses cheveux s’agitent, elle n’a d’yeux que pour son mari. Ca peut paraître idiot et conventionnel, et je dois être un indécrottable romantique au point que mon cœur s’érige le contrôle de mes oreilles, mais voilà moi ça m’émeut. « When you kiss me/ you really kiss me » chante l’épouse comblée. Que Tennis soit vraiment un couple ou non, des marins ou non, au fond je m’en fous. Leur musique m’a fait vraiment ressentir cette émotion, je suis donc prêt à tout croire.

17 janv. 2011

TANKINO : TRON & TRON LEGACY

Illustration:Saïnath
En 1982 sortait sous l'égide de Disney un objet filmique non identifié ayant pour titre Tron qui fit un flop assez conséquent au près du grand publique mais qui devint culte pour toute une génération de jeunes élevés par Pac-Man, Pong et Space Invaders. Près de trente ans plus tard, les studios de l'oncle Walt accouchent d'une suite, gardant le fond et remettant la forme au goût du jour.

"Kevin Flynn est un programmeur de génie, mais ses programmes ont été pillés par un de ses collègues, Ed Dillinger, qui en tire le bénéfice et réussit à le faire licencier. Kevin tente alors de pénétrer dans le système informatique à la recherche de preuves à l'aide de son programme CLU. Mais le système est passé sous le contrôle d'un des programmes d'Ed, le Maître contrôle principal ou MCP (Master Control Program en version originale), un ancien programme d'échecs qui a évolué. CLU ayant été neutralisé par le MCP, Kevin (avec l'aide d'anciens collègues, Lora et Alan) s'introduit dans l'entreprise pour tenter d'avoir accès, de l'intérieur, aux informations qui lui rendraient la paternité de ses créations. Le MCP prend alors le contrôle d'un laser expérimental et réussit à dématérialiser Kevin pour le transformer en programme. À l'intérieur de l'ordinateur, dans un monde apellé "The Grid" les programmes ont l'apparence de leur concepteur. Kevin est capturé par les programmes à la solde du MCP qui tentent de l'éliminer en le faisant participer à des jeux dont l'issu est la mort. Étant le créateur de ces derniers, Kevin réussit à s'échapper et tente alors de sauver le système des mains du MCP et y restera piégé durant 25 ans, jusqu'au jour où son fils Sam, intègre lui aussi le système."


L'intérêt du film est au-delà de cette piètre intrigue de techno-thriller, seul importe le monde virtuel. Ce qui s'y passe a tout d'une guerre de religion. Cet univers numérique laisse place à une peinture prophétique: les programmes croient en leurs créateurs/utilisateurs (les usagers), une croyance que combat le MCP. En tant qu'intelligence artificielle, il veut devenir Dieu à la place de l'Homme dans le cœur des programmes. Tron est un prophète, le juste combattant du dogme classique, le héraut des humains, signe d'harmonie électronique, grand éradicateur de bugs. Il deviendra même David combattant Goliath lors de l'affrontement final. Quant à Flynn, investi des pouvoirs divins de l'usager (ressuscitant les programmes, maîtrisant les véhicules), il devra reprogrammer le MCP maléfique de l'intérieur. L'aspect Divin deviendra la trame principale du deuxième volet, où Flynn le créateur, tel un dieu renié par les siens, veillera sur le monde qu'il a créée. Aujourd'hui, beaucoup se demande en quoi Tron est un film culte et il parfois difficile d'expliquer à quelqu'un n'ayant pas le syndrome du geek ce qui fascine dans un film aux effets si obsolètes. Pour cela, il est nécessaire de remonter le temps et de restituer le contexte de Tron premier du nom. Le début des années 80 marque le début d'une nouvelle ère, celui du numérique. L’informatique explose aux Etats-Unis, Steve Jobs et Bill Gates sortent de leurs garages et deviennent rapidement les symboles de la révolution informatique pour devenir comme on le sait aujourd'hui, certains des hommes les plus influents du monde. Parallèlement, les jeux vidéo envahissent les fast-foods et remplacent les flippers. Ces événements quasi légendaires pour les hardcore gamers trouvent un écho dans la trame scénaristique de Tron. Tout un public est séduit par un film faisant du programmeur génial (et joueur invétéré) le premier protagoniste de son histoire: Le Nerd devient héros. Tron s'empare du vidéoludisme et propose à son public un défi cinématographique révolutionnaire: représenter des acteurs réels dans un univers informatique artificiel. L’histoire ne suppose rien de moins que la création d’un jeu vidéo en trois dimensions, et nous sommes au tout début des années 80 alors que c'est seulement près de 15 ans plus tard que l'ère du jeu vidéo en 3D sera démocratisé. Le recours à l’infographie s'impose comme un choix artistique essentiel. Le film doit être électronique, pour ne pas dire numérique: il proposera une vision originale de ce que devrait être un jeu vidéo vu de l'intérieur. Syd Mead, ayant travaillé sur Blade Runner et le grand dessinateur Mœbius seront les créateurs de ce monde virtuel, et produiront un design inédit et attractif où les formes circulaires prédominent dans cette univers polygonal. À la fois pari artistique et défi technologique, le film ne ressemblera à rien, un Walt Dinsey sous acides, dynamique, contemplatif et bizarroïde. La version 2010 quant à elle, optera pour le style épuré et glossy qu'on retrouve un peu partout dans le design actuel. La vieille souris à deux boutons a laissé place à la MagicMouse tactile. Le long-métrage est très respectueux de son aïeul et se transforme en mise à jour habile, sans prendre trop de risques, misant principalement sur la direction artistique, livrant une œuvre à l'esthétisme léchée et aux scène d'actions époustouflantes. Tron Legacy a su très bien réviser ses classiques, en effet, on y retrouve une architecture sous néons bleus sortie de Blade Runner, les intérieurs évoquent la chambre temporelle de 2001 l'Odyssée de l'espace et Kevin Flynn aka Jeff Bridges n'est pas sans rappeler Obi-Wan Kenobi.


La compositrice Wendy Carlos, qui fût une des toutes premières musiciennes à mélanger orchestre symphonique et synthétiseurs, illustrant musicalement le premier opus, a cédé sa place à deux grands noms de l'éléctro : Guy-Manuel de Homem Christo et Thomas Bangalter, plus communément connus sous le nom des Daft Punk. Les deux compères se sont déjà soumis à l'exercice de la bande originale sur leur film Electroma où sur les films de Gaspard Noé : Irréversible et Enter The Void pour ce qui est de Thomas Bengalter. Machine hollywoodienne oblige, leur BO cède à la grandiloquence de l’orchestre symphonique tout en y faisant répondre la puissance des claviers et des rythmes électroniques qui leur sont propre, restant dans la lignée du travaille de Wendy Carlos sur Tron premier du nom. Les Dafts scellent un mariage sombre entre classique et électronique, qui évoque le compositeur Vangelis ou Philippe Glass, accompagnant merveilleusement les images éthérés du métrage. Bref, une très bonne mise à jour qui vous mettra du bleu plein les yeux, pour peu qu'on ne soit pas allergique à la 3D et aux films commerciaux. Personnellement, j'y retournerai volontiers

16 janv. 2011

KINO KLUB: Honey for Petzi - Made Of Concrete (CH)



Après le clip des Lucernois de Dans la Tente, voici celui de leurs grands frères romands, le trio Honey for Petzi. Le titre "Made Of Concrete" concrétise ainsi le lancement du nouvel album, GENERAL THOUGHTS AND TASTES. Dieu que c'est bon.

Paru chez Two Gentlemen (Sophie Hunger, Solange la Frange, Rosqo, etc.), le 7ème album des Lausannois sera bientôt chroniqué sur Think Tank. Si chaque titre est à la hauteur de ce "Made of Concrete" (non mais le clavier!) ça sera une grande et belle fête pour eux. Honey for Petzi pourrait bien, encore une fois, mettre tout le monde d'accord. On le répète, ils seront au Romandie de Lausanne pour une date qui s'annonce bouillante le 28 janvier. Présence requise.

Et le clip? Réalisé par la troupe régionale Körner Union, qui avait aussi  génialement mis en boîte "Souvenir de Chine" de Larytta - second groupe du batteur Christian Pahud -  cette bichromie sans orientation fixe faite d'images d'ouragans ou petites tempêtes vicieuses tranche radicalement avec ce que l'on voit fréquemment. Cette simplicité apparente est d'ailleurs appropriée au morceau, lorgnant avec classe et nonchalance vers du Chokebore ou du Yo La Tengo pour l'ambiance lugubre de la chose.

14 janv. 2011

Tankino : Somewhere, Sofia Coppola

Photo: Julien Gremaud
En réalisant un film sur la vacuité du milieu hollywoodien, Sofia Coppola tombe en plein dedans et signe un film ennuyeux, parfois beau, vide et rébarbatif. Tout ça ne serait pas bien énervant s’il n’y avait tout ce bruit autour du film et le fait qu’il ait reçu un lion d’or à Venise

Il y a des signes qui ne trompent pas. Et le fait qu’on se soit franchement fait chier en regardant un film de 1h40 en fait partie. Pourtant le lancement m’avait fait une bonne impression : de belles images, de belles chansons et la relation entre un père et une fille. Le problème, c’est qu’au-delà du trailer, il ne reste pas grand chose. Oui il y a de bonnes chansons (Phoenix, Julian Casablancas, Gwen Stefani). Oui il y a quelques scènes esthétiquement réussies, qui se comptent sur les doigts de la main (contreplongée à la piscine, le masque, la télévision italienne). Mais sinon, c’est le vide le plus complet. On a l’impression que 75% des scènes auraient pu être coupées sans rien changer au film. Revenons au pitch : un acteur réside dans un palace, baise à tout va, participe à des fêtes, donne des interviews. Il ressent la vacuité de cette vie de plus en plus profondément. C’est alors que, suite au départ de son ex-femme, il va devoir s’occuper à plein de temps de sa fille, en proie, elle, à l’inquiétude de se voir délaisser par deux parents absents. Le film parle de ça, les moments partagés entre un père et une fille en détresse, avec son lot de bonheur, de déception et de non-dit. Le problème est que Sofia Coppola échoue à filmer tout autant le bonheur que la détresse. On ne sent aucune force dans l’amour entre le père et la fille, aucune tension entre eux. Impossible de ressentir la moindre émotion quand ils se séparent ou se retrouvent.



Certains pourraient penser que Sofia Coppola a mieux réussi à rendre le motif principal : la vacuité de la vie de star hollywoodienne. Si le spectateur s’est ennuyé, ce serait justement parce que la réalisatrice voulait faire ressentir cet ennui. Mais cette homologie est fausse. Un film parlant de l’ennui ne doit pas être ennuyeux, il doit donner à voir à travers des images et des sons en mouvement une représentation de l’ennui, avec toute la tension et la force que ce sentiment peut renfermer. Cette tension, Sofia Coppola n’arrive à la filmer que deux ou trois fois. Notamment dans la magnifique scène du moulage du visage de l’acteur, où un plan avec un zoom très lent rend une sensation d’enfermement et de passivité terrible. Mais une scène, cela reste faible pour sauver un film qui multiplie les moments dénués d’intérêt et de force pour finir de façon nullissime. De plus cette trame de fond du vide de sens de la société « hollywoodienne », n’a rien de bien nouveau et a été déjà décrite de façon bien plus prenante. Je pense notamment aux livres de Bret Easton Ellis ou Joan Didion ou à Lost In Translation. Au final, c’est comme si Sofia Coppola avait confondu représentant et représenté, la forme et le fond. Au lieu de filmer la coolitude et l’ennui de la vie de star, elle filme une vie de star de façon ennuyeuse et cool. C’est ce deuxième élément qui rend d’autant plus agaçant ce film. S’il faut bien reconnaître une certaine qualité photographique à Somewhere, celle-ci est gâchée par la soumission à une sorte de dictature du cool. Du sac Fjallraven Kanken, aux lunettes de soleil en passant par la Ferrari, rien ne nous sera épargné. On a finalement l’impression que certaines scènes du film ne sont là que pour montrer des objets cool, qu’il s’agisse d’un bébé labrador ou un Macbook. S’il n’y a rien à reprocher aux deux acteur principaux, le dictat du cool pour les acteurs secondaires donne dans le bon avec Alden Ehrenreich, présent dans le génial Tetro, et dans l’affligeant presque drôle avec Chris Pontius, ancien de Jackass dont je ne peux me retenir de vous livrer la biographie wiki en guise de dessert: « Chris Pontius aime les déguisements, mais ce qu'il préfère, c'est de se montrer nu, ou presque nu. [… ] On a dit de lui qu'il était "le Superman des temps modernes". Pontius est tellement à l'aise en matière de sexualité qu'il en devient gênant pour son entourage. Quelle que soit la conversation, Chris s'arrangera pour la détourner vers un terrain de perversions énigmatiques où son braquemart règne en maitre. »


11 janv. 2011

TT SPECIAL // KINO KLUB: SPEAKING IN CODE (US)



Les américains de Pitchfork mettent à disposition, ce durant une semaine, le documentaire sur l'électronique à la sauce US, Speaking in Code. On a donc décidé de profiter de leur bonne entreprise pour vous en faire profiter, à vous aussi.

Où il n'est pas vraiment nécessaire de maîtriser les codes de l'électronique pour visionner le documentaire réalisé par Amy Grill et son ami David Day. Un documentaire fait en couple, personnel, émouvant et assez captivant. Question choix de vie, ils ne font pas les choses à moitié: ces gens se tapent régulièrement le trajet Boston-Montréal, soit 500 kilomètres, pour espérer voir quelque chose d'intéressant, Boston semblant être complétement ignoré par la musique digitale. Ce récit d'un binome assez dévoré par leur obsession de musique traverse fréquemment l'Atlantique, direction, forcément, l'Allemagne ou l'Espagne. Outre les moments passés avec le duo Modeselektor à Berlin, ou le déménagement du critique musical américain Philip Sherburne à Barcelone, on pénètre dans l'antre du label Freude am Tanzen, une sorte de communauté hippie 3.0 implantée à Jena, à l'Est de la République de Merkel. L'occasion de suivre longuement le duo barré Wighnomy Brother, fans de vodka et magnifiques losers. On retiendra aussi la partie consacrée au fructueux label de Cologne, Kompakt, sortant quasiment un titre ou une compile par semaine, au moins. S'il n'y a rien de nouveau pour les habitués des clubs germaniques, anglais ou même français, le documentaire vaut ce qu'il vaut et permet de faire un survol instructif sur l'état actuel de la scène électronique occidentale en 2010.


En bonus, un podcast mixé par Tobias Thomas ici. Et un autre de Baltin Moroder ici. Moteur!

9 janv. 2011

KINO KLUB: Dans La Tente - As Long As The Heart Keeps Beating (CH)



Annoncé depuis un petit moment, le clip relatif au récent EP de Dans la Tente comprenant le titre éponyme "As Long As The Heart Keeps Beating" vient de sortir. Où ils ont emprunté la machine à remonter le temps, pour ainsi nous faire oublier le morne présent, emputé de leurs grandes soeurs, The Organ et Electrelane. En attendant, Dans la Tente pourrait bien représenter le futur avec leurs jolis clins d'œil au passé. 

En joli format 4/3, cette vidéo dont on ignore encore qui sont les réalisateur rappelle une époque que nous avons forcément ratée, ou presque, si vous êtes nés avant les années 80. La majorité de l'équipe de Think Tank tapant dans la deuxième moitié de la vingtaine, ou plus, se rappelera peut-être ce qui n'était pas encore appelé "clip", avec en filigrane la naissance de MTV en 1984, qui deviendra, comme on le sait, la première chaîne télévisuelle mondiale. Ce qui, bien entendu, est assez compliqué à comprendre aujourd'hui. Le groupe lucernois est aussi disposé d'une manière hyper référencée, à la manière des invités du show hebdomaire de Tony Wilson (fondateur du label Factory Records et de l'Haçienda de Manchester), So It Goes, sur la nordique chaîne Granada TV (une sorte de la Télé de la région la plus post-industrialisée d'Angleterre). Ed Sullivan, avec son show du même nom, avait lui, bien avant l'ami Wilson introduit ce dispositif devenu classique du groupe jouant comme sur une scène, mais mieux placé pour satisfaire le format télévision.


Pour terminer, comment ne pas parler de Joy Division ici ? La Fender noire,  les reflets sur cette dernière, la batterie minimaliste, le fond géométrique (qui servira aussi à illustrer la pochette du EP), les fondus, les explosions. Et, si vous regardez bien, le socle rotatif sur lequel joue le batteur n'est pas loin de s'effrondrer, surtout lors du final béton. On n'avait pas vu un groupe suisse d'aussi bon goût depuis longtemps, au moins depuis Honey for Petzi. La suite? Un LP, fin 2011. En ce qui concerne Honey for Petzi, ils seront de passage chez eux ou presque, au Romandie de Lausanne, le vendredi 28 janvier. En aftershow, la fine équipe de Think Tank.

8 janv. 2011

TT GOOD TIMES 2010: PALMARES MUSIQUE

Photos: Julien Gremaud


Think Tank a patiemment attendu pour vous livrer son soit-disant palmarès. Yan, Saïnath, Maxime, Pierre et moi-même, Julien, avons réuni tous nos avis - divergents - pour tenter de donner une vue générale de ce qui a fait 2010. Forcément, MGMT ou Arcade Fire trustent les tops. Cela dit, Ariel Pink’s Haunted Graffiti n'est pas en reste, tout comme Deerhunter, Gonjasufi ou encore Sufjan Stevens. Oui, l'indépendant, s'il a une fois existé, est encore présent. Pour débuter les palmarès, place à la musique.

Les meilleurs titres 2010
Yan Luong          "Mi Mujer"– Nicolas Jaar

Saïnath Bovay     1. "The Suburbs" – Arcade Fire
                            2. "Around Us" – Jònsi
                            3. "Desire Lines" – Deerhunter
                            4. "Epoch" – Akido
                            5. "Spanish Sarah " – Foals

Pierre Raboud     1. "Vikram Vikram" – Kamal Hassan and Illaiyaraaja
                            2. "Heavy Pop" – WU LYF
                            3. "Trapdoor" – Salem
                            4. "Round And Round" – Ariel Pink’s Haunted Graffiti
                            5. "Georges Perec (Obamaracas)" – Soirée Chasse
                            6. "Big Coast" – Beautiful Swimmers
                            7. "Tyrant Destroyed" – Twin Shadow
                            8. "Bombay" – El Guincho
                            9. "You" – Gold Panda
                          10. "Wut" – Girl Unit

Maxime              1. "Flash Delirium" – MGMT
                           2. "Albatros" – The Besnards Lakes
                           3. "Suburban War" – Arcade Fire
                           4. "Eyesore" – Women
                           5. "Revival" – Deerhunter
                           6. "Better Times" – Beach House
                           7. "L'estat (Acc. to the Widow's Maid" – Ariel Pink’s Haunted Graffiti
                           8. "Somebody To Love Me" – Mark Ronson
                           9. "Convertiible Balloon" – Wavves
                         10. "Suprise Hotel" – Fool’s Gold

Julien Gremaud  1. "As Long As The Heart Keeps Beating" – Dans la Tente
                            2. "Shark's Tooth" – Archie Bronson Outfit
                            3. "The Impossible Soul" – Sufjan Stevens
                            4. "Why Won't You Make Up Your Mind?" – Tame Impala
                            5. "Baby" – Clinic
                            6. "The Shrew Would Have Cushioned the Blow" – Joy Orbison
                            7. "Shadows" – Warpaint
                            8. "Homebreaker" – Takka Takka
                            9. "Push and Pull" – Pat V. feat Buvette
                          10. "To The Brink" – I Am Kloot


Les meilleurs albums 2010
Yan Luong          A Sufi and A Killer - Gonjasufi

Saïnath Bovay     1. Go – Jònsi
                            2. Sufjan Stevens – Age of Adz
                            3. Deerhunter – Halcyon Digest
                            4. Beach House – Teen Dream
                            5. Flying Lotus – Cosmogramma

Pierre Raboud    1. My Beautiful Dark Twisted Fantasy Kanye West
                           2. Hidden – These New Puritans
                           3. King Night – Salem
                           4. A Sufi and A Killer - Gonjasufi
                           5. La Station Radar Vol. 1 –  Artiste Divers

Maxime              1. Teen Dream – Beach House
                           2. Congratulations – MGMT
                           3. The Suburbs – Arcade Fire
                           4. Public Strain – Women
                           5. Before Today – Ariel Pink's Haunted Graffitiw

Julien Gremaud  1. Crooks & Lovers – Mount Kimbie
                           2. Expo 86 – Wolf Parade
                           3. The Age of Adz – Sufjan Stevens
                           4. Halcyon Digest – Deerhunter
                           5. Sky At Night – I Am Kloot
                           6. The Promise – Bruce Springsteen
                           7. Bubblegum - Clinic
                           8. Black Noise – Pantha du Prince
                           9. Avi Buffalo – Avi Buffalo
                           10. Teens Dreams – Beach House






Les meilleurs concerts / DJ sets 2010
Yan Luong:
The Dead Weather – Montreux Jazz Festival
                           Ritchie Hawtin - Vision Festival, Thoune

Saïnath Bovay    1. Jònsi – Pully For Noise
                           2. Bonobo – Les Docks, Lausanne
                           3. Massive Attack – Montreux Jazz Festival
                           4. Beach House – Montreux Jazz Festival
                           5. FM Belfast – Club Bonsoir, Berne

Pierre Raboud    1. Summer Camp – Midi Festival, Toulon
                           2. Crystal Castles – Fri-son, Fribourg
                           3. Health – Bad Bonn Kilbi, Düdingen

Maxime              1. Pavement – Zénith, Paris
                           2. CocoRosie – Montreux Jazz Festival
                           3. M.I.A. – Rote Fabrik, Zürich
                           4. Beach House – Usine, Genève
                           5. Marilou – Bad Bonn, Düdingen

Julien Gremaud  1. The Whitest Boy Alive –  Tape Club, Berlin
                           2. Ellen Allien – Berghain, Berlin
                           3. Kurz Welle – La Cave à Joe, Lausanne
                           4. The Sun Ra Arkestra – Bad Bonn Kilbi, Düdingen
                           5. Harlem – Magnet Club, Berlin
                           6. Elysian Fields – Le Bourg, Lausanne
                           7. Toro y Moi – Exit,  Zürich
                           8. Britta Arnold – About Blank, Berlin
                           9. Wolf Parade – Bad Bonn Kilbi, Düdingen
                           10.  The Awkwards – Paléo Festival, Nyon
                           Hors-classement: Regina Spektor – Montreux Jazz Festival


Les meilleurs 2010... spécial
Labels
Yan Luong          Raoul Records
Julien Gremaud  Warp

Top Swis
Saïnath Bovay    1. Dimlite - Prismic Tops
                           2. Buvette - Houses and the Voices
                           3. Feldermelder - The Echo Circus
                           4. My Heart Belongs to Cecilia Winter - Our Love Will Cut Through Everything
                           5. Solange la Frange - Solange la Frange

Top musique de film
Saïnath Bovay    1. A Single Man - Abel Korzeniowski
                           2. Scott Pligrim vs. The World - Beck & Nigel Godrich
                           3. The Social Network - Trent Reznor & Atticus Ross
                           4. Brian Eno - The Lovely Bones
                           5. Inception - Hans Zimmer

A écouter
"Mi Mujer"– Nicolas Jaar


"The Suburbs" – Arcade Fire



"Flash Delirium" – MGMT



"Vikram Vikram" – Kamal Hassan and Illaiyaraaja
A écouter ici

"As Long As The Heart Keeps Beating" – Dans la Tente

6 janv. 2011

TANKINO: RON FRICKE "BARAKA" (1992)

Illustration: Saïnath














Considéré par tous comme un chef d'oeuvre du cinéma, Baraka s'est offert une nouvelle jeunesse en sortant en haute définition dans l'anonymat le plus complet. S'il fallait une oeuvre à envoyer dans l'espace afin qu'il se fasse l'ambassadeur de l'espèce humaine auprès d'une potentielle forme de vie extra-terrestre, ce choix s'arrêterait probablement sur Baraka; sublime poème en musique et en images de Ron Fricke.
Œuvre universelle, difficile d'en faire une critique tant ce film touchera différemment la perception de chacun sur le monde dans lequel nous vivons. Une éclipse dans le ciel, l'immensité et la beauté de l'Himalaya, un singe qui se réchauffe dans l’eau, les cultes religieux des hommes, à la fois si différents mais si proches, des regards fixes d’hommes et de femmes mutiques confrontés à une caméra étrangère, des cérémonies de tribus qui communient spirituellement, une virée parmi les étoiles, des événements miraculeusement filmés, les beautés et les horreurs de ce monde, le miroir de l'homme et sa place, minuscule face à la terre, mais qui tel un parasite, la consume comme un cancer, malgré toute la beauté qu'il a quand même pu lui apporter. Complètement calqué sur le concept des Qatsi de Godfrey Reggio, mais au message plus universel, plus humain, sur l'homme, ses croyances et sa place, contrairement à la trilogie Quatsi (Koyaanisqatsi, Powaqqatsi, et Naqoyqatsi) qui bien qu'ils soient très proches, portent un regard pessimiste sur l’avancée de la technologie sur la nature et l'homme. Baraka est sorti en 1992 où il a su imposer ses sublimes images de documentaire sans mots, comme Koyanisqatsi avait réussi à le faire en 1983. Le cinéaste, Ron Fricke, qui avait déjà travaillé comme directeur de la photo sur les deux premiers chapitres de la trilogie Qatsi de Reggio, se refusant de faire une énième production Imax, monta un projet exceptionnel mêlant les paysages grandioses à des instants de vie humaine, frénétiques et émouvants. Le cinéaste est par ailleurs en train d’achever son dernier ouvrage, Samsara, suite indirecte de Baraka où il sera question de naissance, de mort et de renaissance.


En Sufi, Baraka signifie «souffle de vie». Difficile de trouver un titre plus noble pour définir cette sublime succession d’images qui subjuguent le regard et aiguisent les sens. Animé par une puissance tellurique, ce film majeur ne dure qu’une heure trente et pourrait durer une éternité tant il regorge de richesses, de couleurs, de visages et de beautés, toutes glanées sur cinq continents. Bien que le film fête bientôt ses 20 ans, il est toujours le reflet d'une société qui est toujours la nôtre, et le miroir du siècle passé. Un trip unique, étrange, pénétrant, sensuel et poignant. L’état de grâce en cinéma existe. Surtout lorsqu’il prend la forme d'un opéra cosmogonique où l'hymne à la nature et l'obsession pour une harmonie perdue règne en toute placidité. Une seule vision du Baraka, de Ron Fricke suffit pour marquer et amener à penser qu’il est possible d’atteindre une dimension métaphysique et méditative. Il appartient à ces miracles, vertigineux et rares, qui procurent cette sensation apaisante de danser avec les anges. Le documentariste virtuose est parti à la recherche des plus belles choses visibles en Tanzanie, en Inde, en Chine, au Brésil, au Japon, au Koweït, au Cambodge, au Népal, dans les cieux, autour de nous et ailleurs.


Malheureusement, comme dans tout équilibre, il y a le Ying, et le Yang, la beauté du monde laisse sa place à sa misère. Lorsque Fricke nous montrent les "slumdogs" qui farfouillent dans les décharges indiennes, les hommes des villes entassés dans des HLM comme des animaux en batterie, ils nous ramène brutalement à la réalité et nous montre tout en étant impartial les inégalités entre les pays développés et ceux du tiers-monde. De la même façon qu’il n’élude pas les différents génocides, juif ou cambodgien, et n’hésite pas à procurer un malaise réel lorsqu’il s’agit de sonder l'abyme que nous avons nous-même à créer au fil du temps. Les images, toutes tirées du quotidien, rendent compte de cette ambivalence en célébrant le monde dans sa douce horreur et sa choquante beauté. Ainsi que les liens entre l'homme et la nature qui nous unissent tous. Simplicité, émerveillement, universalité, trois mots qui suffisent à décrire ce chef d'œuvre.


Mais pourquoi diable est-ce que je vous parle de ce film? Pour bénéficier de toute sa magie, il aurait fallu le voir son format d'origine, en Imax (à savoir un écran géant de 22m sur 16 avec une pellicule en 70mm), ou simplement au cinéma. Une oeuvre qui, tel le meilleur des vins, perdrait de sa saveur en VHS, DVD ou Divx, subissant la dure loi de la compression d'image. En effet, le film a été scanné en 8K dans les laboratoires de FotoKem Labs, un des seuls au monde à posséder une machine capable d'une telle opération. Une restauration à une telle résolution peut sembler fortuite, puisqu'un Blu-Ray ne permet de s'approcher que d'une résolution 2K, mais n'est pourtant pas innocente et apporte ses bénéfices. A l'instar des transferts DVD réalisés à partir de masters haute définition, celui d'un Blu-Ray réalisé à partir d'une source 8K permet d'obtenir une fidélité accrue des détails de l'image et une fluidité beaucoup plus naturelle. Le résultat est tout simplement à tomber à la renverse, le 70mm choisi par le réalisateur se retrouve transcendé, avec un niveau de détail jamais vu, une profondeur de champ à donner le vertige dans les plans aériens. Mais plus important encore, ce niveau de détail permet de retranscrire toute l'âme du film en lui-même. Voir des images de qualité photographique s'animer, c'est tout simplement la sensation que cela procure, comme si l'écran était une fenêtre sur le monde et ce film justifie à lui seul un investissement dans cette technologie, pour tous les amoureux d'images et de cinéma.


Le film est intégralement disponible en HD sur YouTube si l'on cherche un peu, malheureusement entrecoupés en tranches de 15 minutes. Alors profitez-en, éteignez les lumières, mettez-vous en plein écran 1080p et bon voyage.