Vingtième édition des TT Speaches, périodique critique des sorties musicales du mois écoulé et tentative de recensement le plus exhaustif possible des LPs de qualité ou d'importance. Il en va ainsi: plus les mois passent, plus la tâche paraît ardue (combien d'albums passables pour un seul influent?) et le rythme insoutenable (on l'accorde, un Speaches n'est pas forcément mensuel). Voici donc le numéro 20, étalé sur les mois de février et de mars 2013, en attendant les jours tropicaux (nous y sommes presque).
Julien : "Track ID Anyone?". C'est par ce
quote so 2012 que l'on débute ce nouvel épisode des Speaches, ossature musicale de Think Tank depuis trois ans. Quel morceau donc? Oui, c'est celui qui ouvre aussi les feux de AMYGDALA, album au nom compliqué du pas plus simple à prononcer
auf deutsch DJ Koze. C'est simple, j'avais presque rangé Stefan Kozalla dans les rayons des "historiques" de l'électronique allemande, sortant ici et là des EPs inégaux et d'autres albums en roue libre. Pillier du label colognois Kompakt, Koze a aussi sorti des titres chez Get Physical et Freude am Tanzen avant de fonder son propre label avec Marcus Fink en 2009, Pampa Records (Isolée, Dntel mais surtout, surtout, THORA VUKK de Robag Wruhme, disque du
mois de mars 2011 dans nos colonnes). AMYGDALA démontre un Koze fasciné par ce Gabor "Robag" Schablitzki, se livrant lui aussi corps et âme dans un album aux strates multiples et surtout ambitieux, à défaut d'être son SERGEANT PEPPER LONELY HEART CLUB BAND comme l'annonce sans coup férir le communiqué de presse. S'ils voulaient faire référence au collage de la couverture, conviant autant d'invités que de raison, c'est ok: Caribou est là sur le fameux "Track ID Anyone?" (convaincant), Apparat aussi sur "Nices Wölkchen" (déjà un peu moins bon), Dirk von Lowtzow (de Tocotronic) ou encore Ada pour le très passable "Homesick". Pas hyper enthousiaste par la venue de Matthew Dear sur "Magical Boy", on se reprend sur le surprenamment disco "My Plans" du même Dear. C'est surtout les
tracks solos de Koze qui emportent le LP dans les hauteurs comme "Royal Asscher Cut", royal, "La Duquesa", racé et plus
deep, ou ses
featurings avec des artistes moins connus du grand public à l'instar de "Ich Schreib' Der Ein Buch 2013 (ft. Hildegard Knef)" et le final "NooOoo (ft. Thomerle & Maiko)". C'est pas Liverpool, mais voici la preuve qu'un DJ sait tenir la longueur sur un album.
Pierre : Pour appeler l’été, rien de mieux que d’écouter NOSTALCHIC de
Lapalux. Douze tracks plus liquides les unes que les autres. L’écume sonore se tonifie en un chill trémoussant. Ici, chaque chanson est un cocktail obtenu en mélangeant énergiquement des sample de multiples titres. Du travail frénétique ayant sorti sa chemise à fleur.
"One Thing",
"Guuurl",
"Without You",
"Walking Words" : on pourrait multiplier les exemples qui font s’ouvrir les petits parasols dans nos verres, avant qu’on les sirote avec air coquin.
Julien : Sans transition avec l'hiver, tu nous sors l'album que les antis électro-love adoreront détester, ultra-classieux, suffisamment aventureux pour brouiller les pistes mais parfaitement efficace quand il faut rendre hommage au sexe féminin ("Guuurl"). Stuart Howard a sorti son premier disque fin mars sur le label Brainfeeder (du giron Ninja Tune) après avoir débuté par quelques EPs remarqués au début des années 10. Puisque tu as décidé de dévoiler un album charnel, je relance avec un autre pas des plus impassibles: NO BEGGINING NO END de
José James est sorti le 22 janvier 2013, pourtant on n'a eu que très peu de retours sur ce tout grand album de soul, signé chez
Blue Note, excusez du peu (Erik Truffaz sort aussi ses disques dans cette institution jazz américaine, tout comme Wayne Shorter ou Aaron Neville). James s'ancre dans une tradition très "ancienne école", entre Roberta Flack, Gil Scott Heron, tout en rappelant cependant un croisement de J Dilla et D'Angelo – ce qui ne parlera pas nécessairement aux
kids. Voir le natif de Minneapolis sur quelques scènes estivales serait totalement justifié, tant James est un bon client d'un jazz moderne rejetant le vernis que les grands festivals du genre lui ont imposé, signant par là-même des morceaux de grande envergure comme "Trouble", "It's All Over Your Body" ou "Make It Right". De quoi redonner espoir aux plus déprimés des musiques actuelles (attention Charles Bradley revient lui aussi, j'en parlerai le mois prochain).
Pierre : Deux EP électros sorti ces mois-ci donnent à voir la crème des deux côtés de l’océan et fait sentir leur différence. A ma droite, côté US,
Anthony Naples œuvre au sein de la scène électro de Brooklyn en plein boom, sort EL PORTAL avec sa belle photo de lion en noir et blanc. Ici, quatre titres house pleins de classe. Même en fin de nuit, tout le monde brille avec cette musique. A ma gauche, côté britannique, ça sent beaucoup plus la poussière chez
DJ Rashad et son EP ROLLIN, sorti chez
Hyperdub. Le titre éponyme donne le ton avec un R’N’B’ sous amphète. Les quatres titres partent d’un décor torride pour accélérer frénétiquement le pouls.
Raphaël : Anthony Naples est l'un des protagonistes d'une scène house américaine incroyablement excitante et qui semble balayer les carcans d'une Europe électronique parfois coincée dans son héritage. Si la scène est riche à Brooklyn, où elle commence à prendre une place prédominante, Washington a aussi son lot d'artistes qui, face à un climat moins propice, tracent leur voie.
Maxmillion Dunbar, moitié des Beautiful Swimmers et co-fondateur du label Future Times, est sans doute l'exemple réussi de cette exportation. Son deuxième album, HOUSE OF WOO, te donnera envie de danser comme rarement, dans tous les sens et à toutes les heures: danse d'after-party (
"Loving The Drift"), porn house pour soleil couchant, (
"Peeling An Orange In One Piece"), house pumpy (
"Ice Room Graffiti"), etc. Pourtant, Dunbar évite la facilité: les rythmiques tordues, démontées, ralenties puis accélérées et les clins d'oeil culturels foisonnants en font un album ludique, complice, mais jamais putassier, le résultat d'une digestion ample de décennies de musiques.
Julien : D'ailleurs Raphaël tu pourrais bientôt nous ouvrir une rubrique house américaine non? Il aura finalement fallu attendre la fin de règne de la scène indie, niveau crédibilité, pour que l'électronique finisse par se réimposer outre-Atlantique, si je schématise et invente un néologisme pour l'occasion. La grande question: aura-t-elle une âme aussi forte que celle de Detroit? THANK YOU FOR LETTING BE MYSELF pourrait être le mot d'ordre de cette nouvelle génération US aux platines. Du même nom qu'un vieux morceau de Sly And The Family Stone, c'est aussi le nouvel album de
Omar S. Alex "Omar" Smith est justement un DJ de Detroit d'une autre génération que Naples de même que celle des "fondateurs" de la scène, Derrick May, Kevin Saunderson, Juan Atkins entre autres. Aux côtés de DeepChord, Jay Denham, Omar S fait partie de la génération 2000 de Detroit, et cela se sent: "I Just Want (Mixed by Luke Hess)" ouvre l'album (le 4ème personnel, sur son propre label
FXHE) et on manque de décoller entre nos murs une fois que l'intro revêche allume une house déflagrante. La force de frappe ("Hellter Shelter", "Its Money In The D"…) est subtilement entourées de tracks plus
lights comme "Amalthea", l'electronica "DumpsterGraves" et le titre de fin de DJ-Set "The Shit Baby (CP-1 Played By D.Taylor)".
Pierre : Le meilleur tapoteur du moment,
Araab Musik, revient avec une nouvelle Mixtape, FOR PROFESSIONAL USE ONLY. Et comme à son habitude, ça claque, ça tache et on l’aurait bien vu dans la bande originale de
Spring Breakers. Cette mixtape rassemble des instrus, de qualité mais l'où on ressent le manque de chant. Le manque de rappeur. Car en effet, Araab Muzik laisse un peu côté la transe pour revenir à un son plus marqué hip hop avec des pépites comme
"Getting 2 the Point",
"Y.N.R.E." ou
"Beauty" (c'est tellement meilleur qu'on met les liens des tracks avec les rappeurs.).
Julien : Je t'emboîte le pas: de ce très propre "Beauty", on transite par WOLF de Tyler, The Creator que l'on vient de recevoir et que l'on discutera le mois prochain pour passer au "Take a Fall For Me" de James Blake invitant RZA sur un album ressemblant lui aussi à une mixtape plus qu'à un album, l'absence de fondus enchaînés le distinguant de ce genre car OVERGROWN est un disque plus que versatile, tant stylistique que qualitatif. On devrait en reparler le mois prochain étant donné que ce LP n'est sorti que depuis une poignée de jours, relevons toutefois une certaine déception à mesure que Blake force la production et cherche à signer des chef-d'œuvres (les mêmes haters des morceaux de Lapalux devraient s'en prendre joyeusement au "Retrograde" annonçant l'album). Comme souvent avec Blake, on préfère quand le propos est soutenu par une rythmique hybride, témoignant d'une capacité à "laisser faire" ("Voyeur" ou "Digital Lion") plutôt que de "vouloir faire" ("Our Love Comes Back" ou le très R&B "Life Round Here"). Chers amis, je vous attends au tournant le mois prochain sur ce second album du britannique. Je passe aussi rapidement sur une autre déception (attendue): Atoms for Peace, super-groupe formé par Thom Yorke, Michael "Flea" Balzary, Nigel Godrich et d'autres musicos backing-band de R.E.M., Smashing Pumpkins ou David Byrne, sortait son premier LP fin février. AMOK débute avec une rythmique étonnante eu égard à l'héritage sonore iconique (maniérée?) laissé par Radiohead depuis le début des années 00 (KID A et AMNESIAC vieillissant plus que bien faut-il l'avouer). "Before Your Very Eyes..." ne tarde toutefois pas à dévier sur un lyrisme yorkien tant éprouvé et qui se déroule sur cet album qui semble dater des heures de gloire de Ninja Tune et Warp dans les années 1990. A l'instar de "Default", AMOK est un disque honorable, mais qui semble inopérant pour notre époque. Pire: les connaisseurs témoignèrent de ce LP comme d'un disque électronique fait par des rockers, ce qui, avouons-le, n'est pas le meilleur compliment qui soit. Ceci dit, attestons de notre volonté de décloisonner les genres en avouant que Atoms for Peace ne rentre dans aucune de ces catégories, et heureusement: il atteste, au choix, de l'incapacité du "génie" de Radiohead d'aller voir réellement ailleurs, ou de son obstination que les plus grands fans sauront toujours défendre ardemment (vu leur nombre, on s'en méfierait).
Pierre : Parfait pour les jours de brumes du printemps, comme son nom l’indique, THE FOG de
Paco Sala. Après le très bon RO-ME-RO, cet album sort en version matérielle que sous format cassette à seulement 75 exemplaires. Cette volonté d’induire une rareté traduit à la fois l’aspect anecdotique du projet (il n’a été enregistré qu’en un mois et ne représente pas un album à part entière) et une quête vaine au moment du tout digital, le téléchargement étant possible sur le site du label contre une somme modique. Néanmoins, il y a bien quelque chose chez Paco Sala de l’ordre du trésor caché, ces objets musicaux qu’on chérit presque en secret, sans avoir besoin de les partager. Des merveilles d’intimité portée par une voix féminine aussi cristalline qu’étouffée, les mots ne s’entendent pas, ils se devinent. C’est tout le son qui plane dans un brouillard, la face cachée des scintillements eighties ou des synthés brillants de films de Carpenter : flutes, drones, clochettes, nappes sans noms, une merveille de romantisme.
Raphaël : Moins glam, moins romantique, à croire que je suis resté coincé en hiver:
Prostitutes. Ca sonne comme un sale groupe de garage teenager en pleine rébellion, mais, en réalité, ça fout les boules. CRUSHED INTERIOR est un album d'électronique décharnée et neurotique. Jim Donadio, un type sur lequel on sait finalement très peu, délivre sous le prolifique alias Prostitutes des disques secs sur Opal Tapes ou, dans le cas présent, Digitalis, deux labels également radicaux. On est ici bien loin du clubbing -et Donadio le revendique au travers de son background noise/experimental-: post-indus dératisée et plaintes synthétiques brutes rappellent plutôt la dynamique d'un Pete Swanson moins distordu, mais certainement pas moins toxique. Si ça tabasse parfois machinalement (
"Dial Tone Degradation"), si le club fantomatique n'est parfois pas si loin (
"Jungle Wine"), Crushed Interior est avant tout fait de paysages sonores crissants et minimalistes jusqu'à l'os. Parfois, l'espoir semble pointer le bout de son nez (notamment sur l'explicite "Make a Hole, Look Out"), mais le disque en question recèle une dureté presque désertée de toute humanité, magnifique de brutalité figée et contenue.
Julien : Je prend le virage à 180° avec toi Raphaël pour aborder un autre album neurotique, presque hérétique, en tout cas sacrément iconique d'une époque dite de ralentissement rythmique: IMAGES DU FUTUR est le titre d'une ancienne compétition internationale d’animation par ordinateur soutenue par la fondation Daniel Langlois de Montréal. Fondateur de feu la compète, Hervé Fischer témoigne de sa disparition par ces mots: "C’est la fatalité du futur : il vieillit. Et sauf catastrophe finale, il passe aux archives". Son "exploration vers l’inconnu" résonne face aux états dépouillés décrits par ses concitoyens
SUUNS (signés par le bien nommé label national
Secretly Canadian). "A climate of excitement, hope and frustration" entoure l'élaboration de ce second album selon le chanteur Ben Shemie, gardant une présence nonchalante et quasi-stellaire derrière le micro du quatuor. Malgré quelques kitscheries psychés sur "Mirror Mirror" et de l'auto-suffisance sur le presque emo "Holocene City" ou l'ouverture noise "Powers Of Ten", IMAGES DU FUTUR est en tout point excellent, et c'est un euphémisme. Prenons ainsi pour exemple le titre succédant à ce dernier, "2020", reprenant le morceau-clé du premier album ZEROES QC, "Up Past The Nursery"pour l'articulant dans des spectres déments; "Edie's Dream" jouant sur les terrains de jeux - dangereux - abandonnés d'un Bowie, ou d'autres morceaux évoquant autant Suicide que Spiritualized. Et puis, Suuns fait du Suuns, sorte de rock hanté à l'instar du final "Music Won't Save You" dont on ne sait plus de quel métal il est fait - ces voix samplées! Le groupe passe le 8 mai à la Rote Fabrik zurichoise (plus quelques festivals?). Dans tous les cas, un joli jouet de remplacement au MBV de My Bloody Valentine, et actuel qui plus est.
Raphaël : En disque-miroir des Prostitutes, SOM SAKRIFIS du trio expérimental grec (violoncelle-contrebasse-oscillateurs) Mohammad. Composition quasi-monolithique divisée en trois actes, celui-ci se plonge encore un peu plus loin dans l'abysse. Drones grinçants entrecoupés de ruptures épileptiques et cordes tordues dessinent un univers lent et décadent à la Béla Tarr, suffisamment dissonant pour ne pas réveiller les fantômes tire-larmes du post-rock.
Pierre : Tout le monde finit par se faire vieux : le chanteur de
Wavves a désormais 27 ans. Lui le vilain petit con, qui qui sortait l’improbable WAVVES, enfumé et bruitiste, bien branleur, puis donnait un coup de barre pop très réussi sur KING OF THE BEACH. Trois ans après ce dernier, c’est donc au tour de AFRAID OF HEIGHTS. Et en 2013, à 27 ans, on est déjà un vieux punk. L’album délivre toujours ce style californien, mi glande mi prétention, des guitares et pas grand chose d’autre. Bien sûr il y a dans
"Dog" ou
"Demon to Lean On" quelque chose qui réveille en nous cet instinct adolescent, cette envie
de tendre son doigt en souriant envers le monde entier. Mais AFRAID OF HEIGTS n’a plus la même énergie ou la même insouciance que ses prédécesseurs et on se lasse vite. A choisir, on préférait le petit con.
Julien : Ah oui, et j'oserai pas en dire autant pour David Bowie. THE NEXT DAY mérite son achat pour un titre: "Where Are We Now?". Après mon éloge du dernier - très love - Nick Cave and the Bad Seeds, vous allez m'accuser d'être devenu pantouflard. Ceci dit, même si ce titre est très proche d'un "Perfect Day" de Lou Reed lui-même proche d'une grande tradition de morceaux crève-cœurs anglo-saxons, il a participé de cet élan d'enthousiasme autour de la sortie de cet album bon mais assez inégal. L'histoire bowienne est revisitée en 57 minutes, pas forcément de la meilleure des manières ("(You Will) Set The World On Fire", "Valentine's Day", "If You Can See Me"), la voix faiblit par moment, compensée par la production maousse de Visconti et les longueurs inavouables. Pastiche? Du coup, on préfère quand Bowie rappelle ses successeurs, comme Arcade Fire ("Dancing Out In Space"), Foxygen ("How Does The Grass Grow"), Spencer Krug ("The Next Day") ou encore Richard Hawley. THE NEXT DAY a cette géniale idée que de s'en foutre du mythe David Bowie, alignant les titres "valant ce qu'ils valent", sans véritables trouvailles sonores mais sincères et au souffle vital presque surprenant.
Pierre : Nouvel essai, pas plus de résultat. Décidément, je n’arrive pas à comprendre l’intérêt des albums folks. Pourtant, WALKING ON A PRETTY DAZE de
Kurt Vile avait tout l’air d’un album bien ouvragé. Mais toujours, cette impression d’une musique de feu de bois et de vielles pantoufles. On connaît l’album avant de l’avoir écouté. Tout est si tranquille, aucun souffle si ce n’est un vieux ronflement.
Julien : Je termine comme j'ai débuté ce 20ème Speaches, avec zèle et optimisme:
OY est sans doute l'une des meilleures représentantes de la musique helvétique à l'International. La chanteuse d'origine ghanéenne gère comme personne les références multiples et a priori contradictoires - comment assembler new-wave et percussions? - pour signer l'un des meilleurs albums de l'année, car singulier et à de nombreux égards novateurs. Joy Frempong se profile comme la figure de proue de Creaked Records qui semble gagner en pertinence et en cohérence à mesure que les printemps passent (déjà huit pour le joli label lausannois et l'attente impatience du nouveau Larytta, entre autres disques des Dam Mantle, Julien Aubert, Consor ou encore Buvette). KOKOKYINAKA n'est pas l'album d'une métisse, exotique et amusant à jouer en soirée pour, à choix, passer pour érudit ou entamer une danse chamanique. KOKOKYINAKA consacre OY comme l'une des artistes helvétiques les plus justes musicalement, totalement libre, généreuse mais aussi conceptuelle – il faut écouter "Doondari" pour s'en convaincre, tout un programme, un mini-opéra contemporain faisant se "collisionner" psychédélisme, grime et pop music. Le grime est proche de nombreuses interprétations proto-baroques de OY, comme sur le très syncopé "Tortoise And Hunter". Joy Frempong se rapproche d'artistes comme Four Tet dans de nombreuses productions tout en évitant l'écueil d'une électronica intellectuelle et vaguement rythmique ("Si Tu Veux.."). Les tubes indés (le terme n'est ici pas usurpé) sont foison dans cet LP produit sur ses terres d'accueil berlinoises par son compagnon Lleluja-Ha. Variant les registres, OY termine ce brillant album avec deux morceaux entre le R&B classe de "Carry Me Home" et une comptine terminant les multiples incursions quasi-psalmodiées sinon récitées de OY - "Outro - 1st Class Bus" - rappelant irrésistiblement les tant influents Lost Poets, ultime preuve des strates infinies composant la musique de la dame (elle se produira le 9 mai au
Rocking Chair de Vevey). Et j'y pense: eh les gars, on n'a pas parlé du nouveau
Justin Timberlake? Album du mois :Pierre: Paco Sala : THE FOG
Raphaël: Prostitutes, CRUSHED INTERIOR
Julien: Suuns, IMAGES DU FUTUR
Titres du mois :Pierre:
Ciara, "Body Party" Dj Rashad, "Rollin" Raphaël:
Maxmillion Dunbar, "Loving The Drift" Pete Swanson, "Punk Authority"Julien:
Mogadishu - Shades and Rays Tyler, The Creator, "Partyisntover / Campfire / Bimmer" ft. Lætitia Sadier & Frank Ocean